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Accompagner spirituellement les personnes traumatisées

Martine Jungers, docteur en théologie, prend soin de ceux qui souffrent dans leur âme et dans leur corps.

Ils sont nombreux, dans le diocèse de Luxembourg, à prendre soin des personnes traumatisées, que ce soit dans le cadre de la pastorale de la santé ou de la pastorale des prisons, qu’il s’agisse d’accompagner les migrants, les sans-abris ou les familles en deuil… Et ils étaient nombreux, mercredi 2 avril, salariés et bénévoles, à participer à la formation proposée par le Centre de formation diocésain Jean XXIII. Martine Jungers, docteur en théologie, qui intervenait, joue un rôle majeur dans ce domaine pour l’Église qui est au Luxembourg : elle est en effet responsable au niveau diocésain de la prévention des abus et professeur de théologie pastorale au Centre Jean XXIII – Grand Séminaire de Luxembourg. Avec une grande clarté, elle a condensé en trois heures sa thèse de doctorat sur l’accompagnement spirituel des personnes traumatisées, interrompant régulièrement son propos pour répondre aux nombreuses questions. Un enseignement indispensable pour quiconque veut aider son prochain en vérité tout en préservant son équilibre personnel.

Qui sont les personnes traumatisées ? À différents degrés, chacun d’entre nous : victimes directes ou témoins, d’un événement clair et de courte durée ou d’une série répétitive, que ce fait soit accidentel ou délibéré… Le même épisode peut être vécu de manière directe par l’un et de manière indirecte par les amis, les aidants, les descendants parfois. Chacun réagit de manière différente selon son passé, son éducation, son entourage, son âge… Les effets à long terme, eux aussi, sont variables et peuvent intervenir au niveau psychique, physique, religieux (spirituel) ou encore social. Leur vision du monde ébranlée, les personnes traumatisées peuvent remettre en cause les valeurs auxquelles elles croyaient, perdre tout ou partie de leur foi. Comme l’indique Martine Jungers, « les répercussions dans le domaine religieux et spirituel sont d’autant plus importantes que l’expérience traumatique s’est déroulée au sein de l’Église. »

Plusieurs accompagnements sont possibles, parmi lesquels l’accompagnement spirituel, l’accompagnement pastoral (aumônerie) ou encore la psychothérapie. Cette dernière est une approche scientifique qui utilise différents outils, elle est limitée dans le temps et menée par le binôme patient / thérapeute, ce dernier étant qualifié par une formation. L’accompagnement spirituel ou pastoral construit une relation à trois : l’accompagnateur, la personne accompagnée et Dieu. Les différentes approches ont de nombreux points communs et sont complémentaires, et l’accompagnateur spirituel doit veiller à ne pas franchir la limite de la psychothérapie. Cela peut être le cas s’il tente de poser un diagnostic, s’il utilise des techniques thérapeutiques ou encore s’il tente de découvrir activement les expériences traumatiques. Confronté à ces écueils, il doit orienter l’accompagné vers un soutien thérapeutique. « Attention de ne pas développer de fantasmes de sauveteur ! » met en garde la théologienne.

Ouvrir un espace sûr pour les personnes traumatisées

Certaines règles de la psychothérapie sont précieuses pour l’accompagnement spirituel ou pastoral. Il est important de se mettre d’accord sur le lieu, la fréquence, la durée des entretiens, sur la disponibilité de l’accompagnateur, sur les règles, les objectifs et les limites de l’accompagnement, sur la confidentialité, etc. L’essentiel est d’ouvrir un espace sûr pour la personne traumatisée. Et pour ce faire, l’accompagnateur doit accorder du crédit aux récits de la personne accompagnée, sans les juger. « Nous ne devons pas rester neutre, explique Martine Jungers, mais nous devons prendre parti en nommant l’injustice subie. Nous prenons la personne là où elle est. Une victime peut mentir, élaborer un scénario qui ne s’est pas réalisé, cela arrive. Mais pour nous la vérité n’est pas l’important. Même si le récit est faux, il est le signe qu’il y a un autre problème. »

La foi peut, dans le meilleur des cas, permettre aux personnes traumatisées de gagner en force de vie, en liberté intérieure et en espoir de guérison. Plusieurs outils sont très utiles. Martine Jungers cite la gratitude à exercer dans la rétrospective de la journée, la lecture de l’Écriture (livre de Job, psaumes des lamentations, parabole de la Samaritaine…), le discernement des esprits (consolation ou désolation), les exercices spirituels selon la méthode de saint Ignace de Loyola, la prière. Mais la spécialiste met également en garde contre les risques. « Certains exercices ou certaines techniques ne sont pas bénéfiques pour les personnes traumatisées à certaines étapes de leur vie. L’accompagnateur doit être très attentif aux exercices auxquelles la personne réagit positivement et à ceux auxquels elle ne réagit pas. » Le silence d’une retraite spirituelle ou même d’un simple temps de méditation peut rendre les souvenirs tellement présents qu’ils en deviennent insupportables.

Pour les accompagnants, un principe s’impose : il faut se sécuriser, se protéger, ne pas tout subir. Marc Hubert, aumônier laïc, responsable du service pastoral du Centre Hospitalier du Nord, remarque : « la foi nous prépare à avoir un bon équilibre. L’important est d’aimer Dieu et notre prochain comme nous-même. Quand on aime juste Dieu, on est pieux mais hypocrite, quand on n’aime que soi, on est égoïste, si on aime juste les autres, le burn-out nous guette. » La formation du jour a aidé chacun à mettre un peu d’ordre dans sa pratique et à clarifier des situations déjà vécues. Indispensable pour continuer à accompagner le mieux possible.

Le mercredi 16 avril prochain, le Centre de formation diocésain Jean XXIII organise une escale spirituelle dans la montée vers Pâques, proposant de prendre du temps avec d’autres pour préparer le Triduum pascal et plonger dans le mystère pascal. La journée sera animée par le père Thierry Lievens, jésuite, théologien, accompagnateur spirituel au Centre spirituel La Pairelle et au Séminaire de Namur. Inscription ici.

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